vendredi, 19 septembre 2014 06:38 Écrit par  Cuma Pascasie

Une réfléxion à laquelle j’invite son Excellence Monsieur le Président de la République du Burundi

Excellence Monsieur le Président,

A chaque fois que vous prononcez des discours, il y a un mot qui revient chaque fois, plus souvent, trop souvent. C'est le mot '' sécurité''.

Monsieur le Président, après avoir entendu ce mot de votre bouche dans tous vos discours, dans les discours de vos conseillers et de vos portes parole et de toutes les institutions que vous avez mis en place, je voudrais en savoir un peu plus, avec votre concours, s'il vous plait Monsieur le Président.

Monsieur le Président, vous avez une garde présidentielle de choc. Vous avez un service de renseignement des plus rodés, vous avez une police qui ne jure que par vous. Vous avez une milice en plus qui n'a d'autre fonction que de trier dans la population chaque mot qui dirait du mal de vous. Vous y avez ajouté des comités de sécurité sur toutes les collines et dans tous les quartiers.

Cette sécurité qui est chantée partout et toujours n'est donc pas pour vous directement. A moins que je me trompe. Votre sécurité est garantie à 100%. Vos officiels, Ministres, cadres du parti, hauts cadres du gouvernement, tous ont des gardes rapprochées, dans leurs véhicules et dans leurs enclos. ALORS, POUR QUI LA SÉCURITE, Monsieur le Président ?

Je pose cette question parce que malgré toutes ces structures qui font de notre pays l'une des prisons à ciel ouvert les mieux contrôlées du monde, la sécurité n'est garantie pour personne. Et la mort ne vient pas de l'extérieur. Considérez, Monsieur le Président : Tous les politiciens qui veulent la démocratie sont contraints à mourir ou à s'exiler. Tous ceux qui ont souffert pour voir ce changement pleurent aujourd'hui.

Ceux qui ne peuvent pas fuir et échapper à vos services sont exécutés sans pitié. On retrouve des corps sans vie partout dans le pays. Dans les ravins, dans les rivières, dans les lacs, dans les caniveaux, dans les buissons, dans les maisons, sur les voies publiques... D'où viennent ces cadavres Monsieur le Président ? Vous savez très bien que ce n'est pas de l'extérieur.

Alors pourriez- vous répondre à cette question ? Qui tue ces gens et menace la sécurité du peuple ? Peut-être même que vous n'aurez pas la réponse, ni le temps de la chercher vu vos trop nombreuses occupations.

Permettez- moi de tenter une interprétation à laquelle vous réagirez quand vous aurez le temps de vous occuper des misères de votre population, si jamais il vous arrivait de penser à elle.

Excellence Monsieur le Président, lorsque nous avions commencé la lutte pour l'indépendance dans un processus révolutionnaire quasi panafricain dans les années 60, la principale contradiction à cette époque, était la colonisation.
Une révolution sociale n'a pas pu aboutir pour avancer vers la démocratie sur des bases plus réalistes et plus solides, malgré la vision progressiste, du Prince Rwagasore et de Paul Mirerekano, à ce moment mal entourés.

En 1965, une autre révolution sociale et citoyenne a échoué faute également de maturité et de vision progressiste du système monarchique de la féodalité au pouvoir à ce moment là pour exploiter les forces du changement qui s'annonçaient pacifiquement.
Des erreurs furent commises qui ont empêché le changement qualitatif que les élections avaient préparé. Et tous ces événements vous sont un mystère parce qu'ils n'ont ni suite logique ni valeur historique particulière pour vous. Les forces négatives réactionnaires autour du roi d'abord et Micombero ensuite résistaient pour maintenir le pays dans le statu quo ante et c'était normal.

En 1972 en passant par 1969 et 1971, les mêmes forces négatives se débattaient et massacraient des populations pour essayer de survivre malgré l'avancée du temps.

Sous des formes variées mais avec les mêmes objectifs, Bagaza et Buyoya continuèrent sur la même lancée. Il a fallu la naissance des mouvements comme le MEPROBA, le BAMPERE, l'UBU, le PALIPEHUTU et même certaines forces au sein de l'UPRONA malgré tout, et les autres pour enclencher le réveil de la population burundaise pour une démocratie véritable.

Tous ces mouvements ont souffert des forces réactionnaires qui continuaient de les tirer en arrière, lesquelles forces sont lourdement représentées par votre pouvoir aujourd'hui. Nous y reviendrons.

Mais, Monsieur le Président, en 1993, une oligarchie qui avait emprisonné le pays comme vous aujourd'hui, a commis l'irréparable et assassiné des milliers de gens dont Ndadaye Melchior, le tout premier chef d'Etat démocratiquement élu depuis que le Burundi existe comme nation.

La différence avec vous, elle n'est pas très grande tout bien analysée, est que cette oligarchie de 1993 a organisé un massacre ouvert à partir du sommet. Mais en camouflant les cadavres par les têtes coupées et jetées séparées des corps, la responsabilité est moins claire.

Mais, je m'en voudrais de ne pas vous dire que vous vous trompez lourdement Monsieur le Président en croyant que la vérité ne serait pas connue.

En effet, quand, des corps flottent dans les rivières, ligotés et exécutés avec une ignominie aussi méticuleuse, quand des corps sont retrouvés dans des caniveaux sans têtes, ils ont beau être deux, trois, ou dix, mais ils ne sont pas moins hideux que des milliers assassinés par Buyoya ou Micombero.

Monsieur le Président, en 1994, des hommes et des femmes se sont levés pour arrêter les massacres organisés par l'oligarchie et un processus révolutionnaire dont vous êtes issu a commencé le combat. Non sans encombre et avec des forces négatives au sein de la lutte armée et d'autres au sein des partis fantoches la révolution a fait son chemin.

Dans l'encadrement des militants, et je supposais que vous en avez aussi bénéficié, nous avions quelques questions auxquelles nous demandions aux combattants de savoir répondre.

En voici quelques unes : Pour qui vous battez-vous ? Contre qui vous battez-vous ? Pourquoi vous battez-vous ? Comment vous battez-vous ? Quels sont vos alliés ? Quel est votre ennemi ?

Les réponses à ces questions sont dans les codes de conduite que vous avez certainement lus. Il me semble qu'elles sont entrées d'une oreille et sorties par l'autre dans plusieurs des combattants et ex-combattants que nous voyons aujourd'hui au service de l'Etat sous diverses formes.

Ces questions, Monsieur le Président semblent très simples. Mais les réponses renferment toute une philosophie qui, si elle guidait votre gouvernance, le peuple burundais en serait bénéficiaire.

Au moment où on commençait le combat en 1994, beaucoup d'entre vous croyaient se battre contre les Tutsis. Ce qui était une vue plutôt superficielle de la lutte. Puis vous avez changé la forme du combat après une chance extraordinaire qui vous était offerte pour gouverner le pays et l'avez orienté contre votre peuple en général et principalement contre les Hutus de Bururi. Mais là aussi, on peut faire une rectification. Tout le pays meure dans toutes les provinces.

J'espère que vous voyez où cela mène le pays aujourd'hui. Et si tel est le cas (si vous voyez où on en est dans la misère du peuple), les millions de voix qui réclament votre démission du pouvoir sont légitimes et votre sens de responsabilité vous dicterait de céder le pouvoir.

Excellence Monsieur le Président, revenons encore un peu à nos questions sur la sécurité aujourd'hui dans notre pays. Toutes les infrastructures que vous mettez pour faire du pays une prison bien gardée visent quoi exactement ?

1. La protection (la sécurité) des voleurs que vous avez installés au sommet de l'Etat : les ministres, les hauts cadres du parti, les généraux en puissance, la bourgeoisie compradore et parasitaire.

2. La pérennisation au pouvoir de votre parti,

3. La paupérisation de la population et l'enrichissement des impérialistes.

4. La protection des intérêts de certaines puissances occidentales et régionales, bref des impérialistes qui protègent votre pouvoir.

Voilà à'mon humble avis la réponse à la question.
En fait Monsieur le Président, vous avez opté pour un principe : vivre et laisser mourir. Les jeunes qui meurent de faim, les familles qui ne peuvent plus manger... Ceci ne vous préoccupe pas. Et pourtant vous célébrez toutes les années devant un Dieu dont vous bafouez les commandements les plus simples : J'ai eu faim et vous m'avez nourri, j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire, j'étais en prison et.....
Pour vous, la situation a changé : J'ai eu faim et vous m'avez affamé plus, j'ai eu soif et vous avez tari la source, j'étais en prison et vous avez renforcé mes chaînes, j'étais malade et vous m'avez achevé....
En effet, que disent et que pensent toutes ces personnes affamées, tous ces prisonniers, toutes les familles dont les maris, fils, amis se retrouvent dans les lacs, dans les rivières, les ravins, caniveaux, buissons ... pourrissant sans tête et sans sépulture décente... Que peuvent-ils dire ?

Monsieur le Président, au début, une fraction insignifiante de l'ancienne oligarchie Tutsis liait les mains dans le dos la population.
Aujourd'hui, cette même petite classe s'est alliée avec une autre oligarchie similaire également infime et issue cette-fois d'une petite fraction de la communauté des Hutus que vous pilotez pour renforcer son emprise et son exploitation de la population.
Et si vous faites une bonne analyse, la population souffre plus qu'elle ne souffrait sous le joug de l'UPRONA et la misère devient insupportable.
Excellence Monsieur le Président, à quelque chose malheur est bon. Vous ouvrez les yeux à la population. Pour certains des intellectuels opportunistes, vous êtes l'élément qu'il fallait, au moment qu'il fallait. Et pour ceux qui comprennent bien la dialectique, vous êtes maillon qui manquait pour favoriser la complétion de la révolution.

Monsieur le Président, j'ai dit que notre processus révolutionnaire a commencé plus tôt que vous ne pouvez comprendre.
Dans certaines luttes récentes, par manque de discernement certains Hutu croyaient que les Tutsis étaient l'ennemi N°1 tant ils incarnaient l'injustice et l'exclusion.

Mais ce n'était qu'une poignée des Tutsi qui incarnait le mal et qui se couvrait d'ethnie pour conserver ses avantages. Et la majorité des Tutsis souffrait autant que la plus grande majorité représentée par les Hutus. Peu de gens le remarquaient. Aujourd'hui, la même poignée de Tutsi s'est alliée avec une poignée de Hutus que vous pilotez au pouvoir pour mieux asseoir sa main mise sur la richesse du pays et la paupérisation des Burundais. Elle n'est donc pas en dehors de ce qui se passe dans notre pays. La main de l'UPRONA sous son côté négatif vous colle au dos.

Seulement elle se cache derrière le mal plus visible que votre parti inflige à la population. Mais une leçon peut être tirée aujourd'hui, une leçon qui va accélérer notre révolution devenue inéluctable et irréversible. La conscience de la racine du mal est bien là aujourd'hui.
.

Conclusion

Excellence Monsieur le Président, par vous, le peuple peut ouvrir les yeux. Hier, il pensait que seuls les Tutsis étaient à la base de la misère dont il souffrait. Il pensait que le Hutu au pouvoir allait lui apporter le bonheur. Mais, le pouvoir CNDD-FDD a montré aux Tutsi pauvres que le bien ne vient pas nécessairement du Tutsi et que le mal n'est pas nécessairement dans le Hutu. Le mal n'est pas pire que le mal.

Le pouvoir du CNDD-FDD a montré aux Hutus que le bonheur n'est pas nécessairement dans les Hutus et le mal dans le Tutsi. Il a clairement démontré que la bourgeoisie compradore n'a pas de couleur.

Que le mal n'est ni dans l'ethnie, ni dans la région de Bururi comme vous l'enseignez trop souvent à des Burundais mal inspirés, mais que la bourgeoisie compradore, hutu ou tutsi n'a pas de pitié pour le peuple. Qu'elle peut être de Hutus ou de Tutsis, du nord, du centre ou du sud, elle peut être chrétienne ou musulmane, elle est la même partout au Burundi et dans le monde.

Avec le pouvoir UPRONA, les Hutus étaient marginalisés. Avec le pouvoir CNDD-FDD, les Hutus restent encore plus marginalisés. Peut-être ceux de Bururi un peu plus, mais les jeunes chôment à Ngozi comme à Bururi et à Makamba. Les paysans meurent de faim à Bururi (moins) et à Ngozi, Kayanza ou ailleurs dans le nord du pays de la même manière que partout dans le pays.
Les Hutus sont assassinés à Muyinga, à Kirundo, à Bururi et partout dans le pays par les services du CNDD-FDD, aujourd'hui formé par des Hutus et des Tutsis ensemble.

Et les Tutsis pauvres sont un peu plus tranquilles parce qu'ils représentent un peu moins une menace pour le pouvoir, supposé hutu.
Pour les gens qui ne comprennent pas encore, les pouvoirs se remplacent et se ressemblent. Mais pour les meilleurs observateurs, le pouvoir CNDD-FDD fait avancer le peuple burundais dans sa maturité politique. Le mal n'est pas dans l'ethnie, dans la région, mais dans le système. Du mal, il pourrait jaillir quelque chose de beau demain. Le saut qualitatif brusque.

La mauvaise répartition des richesses du pays n'est pas une tare ethnique ou régionale des Tutsis uniquement ou des Hutus seuls. Elle est organisée par des individus, Hutus et ou Tutsis alliés à l'impérialisme mondial. Au moment où les élections de 2015 approchent , le peuple devrait se rendre compte aujourd'hui qu'il faut voter pour un programme. Et nous espérons que 2015 montrera que la maturité du peuple n'attend pas les ordres du pouvoir.

Avant de clôturer mon entretien, je réitère ma question, Monsieur le Président. Pour qui est la sécurité dont vous avez le souci de tous les jours ?

A bon entendeur salut.

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